Lamas Elevage: A propos de la surveillance de la femelle gestante
Une femelle gestante n'est pas un animal malade, c'est simplement un animal qui mérite une attention particulière de la part de l'éleveur. Le risque, c'est l'interruption de la gestation par un avortement ou une mise-bas prématurée ainsi que des complications pour la mère.
Maintenir l'animal dans un état corporel satisfaisant doit être le premier souci de l'éleveur: une maigreur excessive pourrait entraîner la perte de l'embryon , trop grasse, la femelle peut avoir une mise-bas plus difficile.
Le risque, c'est souvent un traumatisme: chocs ou chutes.
A ce propos un cas dans mon élevage. En juin 2002, des journalistes me rendent visite. Après leur avoir longuement expliqué combien j'étais attaché à ce que l'on ne considère pas les lamas comme des animaux sauvages apprivoisés mais bien comme des animaux domestiques et que, de surcroît, j'attache une attention particulière à la docilité dans mon élevage, nous partons faire des photos. Mais arrivés à l'entrée du parc, les journalistes ne veulent pas franchir le portail ,inquiets de la projection du fameux jet de salive. Quelque peu contrarié je réussis à les faire pénétrer mais cela prends du temps et Clorinda, une de mes femelles en profite pour sortir attirée par les feuilles d'un tilleul tout proche. Ils m'aident à la faire rentrer mais , manquant pour le moins de pratique, ils font peur à la femelle qui choisit de sauter la clôture pour réintégrer le troupeau. Par malheur, elle s'accroche un antérieur dans le haut du grillage, bascule en avant et se trouve suspendue dans une position tire-bouchonnée très inconfortable. Je réussis à la dégager assez rapidement . Juste une petite estafilade cutanée qui cicatrisera sans problème et une très légère boiterie pour 2 jours. Clorinda était pleine de 9 mois bien sonnés à ce moment là .Environ 2 mois plus tard je suis en Allemagne pour un concours suivi d'un stage de formation de juges. Un des mes fils qui me garde l'élevage appelle le vétérinaire parce que Clorinda n'arrive pas à mettre bas .Les manœuvres obstétricales s'avèrent extrêmement difficiles: antérieurs et postérieurs sont rassemblés dans une présentation transversale. Cet excellent praticien arrivera néanmoins à extraire le cria mais trop tard pour qu'il soit vivant. J'aurai à maîtriser à mon retour une infection utérine qui ne laissera pas trop de trace puisque la femelle sera à nouveau gestante 45 jours plus tard.
Il ne peut y avoir de preuve qui établit la relation de cause à effet mais c'est ma conviction de praticien.
Le premier enseignement de ce cas est qu'un lama isolé du reste du troupeau peut avoir des réactions qui le mettent en péril et qu'il faut donc éviter cela en anticipant.
Le deuxième, c'est que si c'est une femelle pleine il est encore plus urgent d'anticiper.
Cette démarche d'anticipation sur ce qui peut survenir d'accidentel s'appliquera dans autant de situations que l'on peut imaginer. C'est le cas, en particulier, des transports. La période la plus critique est le dernier tiers de gestation. Le transport sera d'autant plus risqué que la femelle sera d'un caractère nerveux ce qui l'exposera plus aux chocs par ses réactions excessives.
Un autre cas particulier parmi d'autres est la femelle que l'on présente au mâle alors qu'elle est pleine et qui en présence d'un mâle fougueux ou parce qu'elle se sent dominée, se laissera saillir de nombreuses fois. Il y a risque surtout si la femelle est malmenée.
On ne peut envisager toutes les situations, ce qu'il faut retenir c'est qu'il faut prévenir les situations tumultueuses .Eviter les traumatismes de la mère qui secouent aussi le fœtus.
André Richard
Lamas et Alpagas Magazine hiver 2006