Apporter les soins nécessaires au lama nouveau-né(cria) que la mère saura élever ensuite sans qu'on perturbe la relation avec son cria

Lamas élevage: Soins au lama nouveau-né ( cria )

 

Le cria vient de naître avec ou sans aide. Et maintenant, que fait on?

Premièrement, ne pas nuire, ou au minimum, nuire le moins possible.

Dans la plupart des cas, lorsque la naissance s'effectue à son terme ou un peu après, à la bonne saison, avec une mère en bon état, ayant déjà élevé de façon satisfaisante un cria, le mieux sera d'importuner le moins possible la mère en intervenant donc le moins possible sur son petit.

 Car même si les mères peuvent être particulièrement douces et compréhensives chez les lamas, il n'en reste pas moins que ce cria, c'est le leur. On peut comprendre, alors,  même si on n'est qu'un homme, que ce cria, ça ne lui plaît pas qu'on le manipule sous son regard interrogateur.

Néanmoins un minimum de soins peuvent être mis en œuvre.

Tout d'abord, il n'est pas inutile, surtout si l'expulsion du fœtus a été laborieuse, de suspendre immédiatement le cria tête en bas pour lui faire recracher d'éventuelles glaires pouvant gêner sa respiration .On peut lui asperger en même temps la nuque d'eau fraîche ce qui provoque un effet positif sur la respiration. Ensuite,  on le frictionnera avec une serviette en le débarassant des restes de membrane épidermique.

On aura soin, pendant que l'on s'occupe du petit, de détourner l'attention de la mère en lui donnant un peu de granulés, juste récompense et restauration des forces pour son beau travail. On en profitera pour désinfecter le cordon( teinture d'iode ou chlorexidine diluée à 2%) et le peser. Connaître le poids de naissance est intéressant en soi ( de 9 à 16 kg ) mais aussi pour le comparer à d'autres pesées ultérieures dans le cas où on aurait des doutes sur la croissance du cria.

Mais tout ne va pas toujours bien .

Il peut arriver que le cria ne s'alimente pas ou pas assez. Cela est d'autant plus grave qu'il n'y a pas transfert d'immunité au petit pendant la gestation.

Le cria a donc absolument besoin du colostrum pour disposer des anticorps  (immunoglobulines ou IgG ) qui le protègeront contre certaines agressions microbiennes ou virales. Ce colostrum doit être pris impérativement dans les 24 premières heures de la vie car il se trouve qu'ensuite les anticorps ne peuvent plus franchir la barrière intestinale du cria .Il faut aussi que la quantité d'IgG soit suffisante. On estime qu'il faudrait environ une quantité de colostrum égale à 10% du poids du petit, ce qui fait 1000ml pour un cria de 10 kg. En pratique lorsque on doit alimenter le petit cela paraît vraiment beaucoup et souvent il est difficile d'administrer plus de 6% du poids.

Si on peut en disposer, on peut utiliser du colostrum congelé de chèvre dont la composition se rapproche le plus de celle du lama.

 Pour moi, sauf si la mère n'a pas du tout de colostrum, ce qui ne m'est pas arrivé, je préfère la traire, même s'il est parfois difficile d'obtenir de grandes quantités.

Juste une petite anecdote à ce sujet: sur mes 5 premières naissances aux Granades de mères importées d'Argentine, aucun cria ne s'est mis à téter correctement. Les mères,  saillies trop jeunes, mal nourries pendant la quarantaine argentine, ont mis bas des crias faibles et elles n'avaient pas beaucoup de lait à leur offrir.

Ces mères, primipares, qui n'avaient jamais été manipulées, j'ai pu les traire toute les 5 malgré mon inexpérience en la matière, ne tirant que 20 à 60 ml de colostrum à chaque fois mais recommençant toutes les 2 ou 3 heures( une injection de 30 à 40 unités d'ocytocine quelques minutes avant peut aider à l'éjection du lait mais n'en créera pas s'il n'y en a pas) Les crias pesant entre 8 et 9 kg j'arrivai à leur faire absorber entre 500 et 800 ml. Je faisais ensuite immédiatement absorber le colostrum au petit. Au bout de 24 à 48h les crias ont eu assez de force pour téter tout seul et leurs mères ont toutes réussi à les élever de façon satisfaisante.

Ces petites quantités de colostrum on peut les faire prendre à la seringue. On introduit la seringue au milieu de la bouche du cria exactement comme s'il tenait la tétine, bouche bien fermée, puis on aspire un tout petit peu, cela crée une dépression et le cria, peut-être dans un réflexe, enserre le bout de la seringue avec sa langue, on pousse alors un peu de liquide puis on aspire à nouveau et on pousse à nouveau le piston…Ainsi de suite jusqu'à l'absorption totale. Le cria ne  tète pas forcément mais ainsi il avale tout doucement sans rien rejeter et sans risque de fausse route.

Même si des femelles lamas avec leur petit à côté d'elles, ne perdent pas vite leur lait quand elles sont ni tétées ni traites, l'ingestion du colostrum maternel par le cria me paraît préférable à tout autre(sauf cas particulier de défaillance maternelle) et ensuite la traite en entretenant la lactation conduit quand même plus rapidement à un retour à la normale ne serait ce que parce que l'éleveur a devant ses yeux une autre source d'allaitement que le biberon et que ça l'encourage à orienter le cria plus vite vers celle-ci.

 

Une autre méthode est le sondage oesophagien. Il se pratique avec une sonde oesophagienne pour chien de diamètre extérieur 6 mm. Il faut se placer à califourchon sur le petit lama en décubitus sterno-abdominal. En introduisant très délicatement la sonde en direction du pharynx on la lui laisse avaler pendant que les doigts de l'autre main contrôlent du côté gauche sa progression dans l'œsophage. Il faut descendre jusqu'à la poitrine pour que la gouttière oesophagienne se referme et que le liquide se retrouve dans le compartiment C3 et non C1 où il provoquerait une fermentation gênante.

J'ai surtout utilisé cette technique du sondage pour d'autres liquides que le colostrum, quand la quantité de liquide est supérieure.

En effet lorsque un nouveau-né ne va pas  vers sa mère pour téter, parce qu'il n'a pas assez de force ou bien parce que, même en l'approchant doucement de la mamelle, il se refuse obstinément à prendre la tétine, alors on peut faire absorber par sondage 100 ou 200ml d'une solution réhydratante  pour veaux ou même pour enfants.

 Cette absorption rapide d'un liquide réhydratant mais aussi énergétique(glucose) semble faire un effet "coup de fouet". En même temps, le petit n'a pas eu son comptant de succion et, plein d'énergie tout d'un coup, il en redemande et se dirige vers la mère pour téter.

Ce qui est absolument essentiel à mon avis c'est de na pas perdre de vue le but poursuivi. Il s'agit de faire en sorte que le cria tète tout seul sa mère. Si on lui donne au biberon sa ration de colostrum de chèvre puis dans les jours ou les semaines qui suivent sa ration de lait en poudre, le cria rassasié ne se précipitera pas sur les tétines. Mais si on ne lui  donne au départ que trop peu il risque de perdre de plus en plus de force et donc de ne pas pouvoir aller à la mamelle ni trouver la force de téter .C'est donc toujours un équilibre à trouver: donner assez pour revigorer le petit et pas trop pour que le petit veuille en prendre un peu plus de lui même. Dans le même temps ne pas rompre le lien mère-cria.