La petite douve chez les lamas et alpagas.
Dicrocoelium lanceolatum ou dentriticum ou petite douve du foie est un parasite des ruminants mais aussi de l’homme. Connu surtout pour affecter les ovins, nous savons tous qu’il affecte également les lamas et alpagas. Les contaminations interspécifiques sont possibles.
Toutes les classes d’âge sont concernées mais ce sont les animaux âgés (5-6ans) qui présentent les signes cliniques les plus importants. En effet, il semble qu’il n’y ait pas d’immunité contre ce parasite et par accumulation on a pu constater jusqu’à 50000 petites douves sur une brebis adulte.
Dans le cycle de la petite douve ( cf figure), les lamas et alpagas sont les hôtes définitifs mais avant de les infester la petite douve passe par des stades évolutifs qui sont hébergés par 2 hôtes intermédiaires. Le premier est un petit escargot terrestre (Zebrina detrica, helicella lubrica), gastéropode « xérophile » de la famille des Hélicidés, adapté à des milieux secs et le deuxième hôte est une fourmi (formica fusca)
L’hôte définitif ingère la fourmi hébergeant le stade métacercaire du parasite. Ces métacercaires , par voie sanguine, gagnent le foie puis se fixent dans les voies biliaires où elles deviennent adultes. Les petites douves se nourrissent de bile. Elles vont alors pondre des œufs qui sont éliminés avec les fèces.
L’escargot terrestre, premier hôte intermédiaire, va ingérer les œufs qui renferment le stade miracidium du parasite qui évolue en sporocyste puis en cercaires qui sont libérées par l’escargot sur le sol.
C’est là qu’intervient le deuxième hôte intermédiaire qui est une fourmi. Dans l’organisme de la fourmi le parasite passe par le stade métacercaire.
Dans le cycle du parasite ( cf toujours figure) c’est maintenant au tour de la fourmi d’être ingérée par nos petits camélidés. Cette ingestion est d’ailleurs favorisée par un changement de comportement des fourmis ayant ingéré le parasite. En effet une métacercaire ingérée va se fixer sur un ganglion sous-oesophagien, ce qui va provoquer des spasmes des mâchoires de la tombée du jour jusqu’au petit matin. La fourmi, ainsi bloquée sur son brin herbe sera évidemment plus facilement ingérée que si elle se promène sur le sol .Quand la température s’élève la fourmi reprend son comportement normal.
Parmi toutes les espèces sensibles les ovins et les petits camélidés semblent être celles qui présentent les signes cliniques les plus graves.
Chez les lamas et alpagas, les infestations légères ne se manifestent pas cliniquement. Dans les infestations massives on a une détérioration progressive de l’état général avec des animaux qui restent plus souvent couchés, on note une hypothermie et une anémie. Les enzymes hépatiques ne reflètent pas toute l’importance des lésions. Pourtant finissent par s’installer, sur le foie et les canaux biliaires, des lésions de cirrhose, des abcès ou encore des granulomes.
Pour le traitement de la petite douve nous ne disposons que de quelques molécules plus ou moins efficaces. Et encore, il faut augmenter la posologie pour cela.
L’albendazole (valbazen) peut être utilisé à la dose de 15-20mg/kg. Ne pas traiter les femelles dans le premier tiers de gestation. Il faut signaler qu’il a été rapporté des cas d’intoxication mortelle aux USA sur de très jeunes alpagas (1-7 mois) auxquels on avait administré des doses de 33 à 100mg/kg et ce pendant 4 jours consécutifs.
Le netobimin (hapadex) peut être utilisé à la dose de 20mg/kg. Ce produit ne doit pas être utilisé dans le premier tiers de gestation.
Le praziquantel (Cestocur) semble avoir une bien meilleure efficacité que les 2 premières molécules citées. C’est donc le traitement de choix .
Malheureusement il faut l’employer à plus de 13 fois sa posologie normale, 50mg/kg à la place de 3,75 mg/kg ce qui représente des quantités de liquide très importantes à faire ingérer et également un coût élevé. Par contre, à cette posologie invraisemblable, il n’a pas été signalé de toxicité et il est possible de traiter les femelles gestantes. Une publication récente (octobre 2013) de scientifiques* de l’université vétérinaire de Vienne (Autriche) fait état de la mise au point d’une pâte incluant le praziquantel à forte concentration (250mg/ml contre 25mg/ml pour le cestocur) et présenté dans une seringue graduée. Pour l’instant je n’ai pas connaissance de sa mise sur le marché.
La prévention est difficile. Il n’est pas question d’éliminer les escargots ou les fourmis par des produits chimiques qui n’auraient comme résultat que de nuire gravement à l’environnement.
*Veterinary parasitology vol 197, Issues 1-2, 18 Octobre 2013 pages 122-125
Agnes M Dadak, claudia Wieser, Anja Joachim, Sonja Franz Institute of Pharmacology and Toxicology, Department of Biomedical Sciences, University of Veterinary Medicine Vienna